Vous venez de prendre la décision difficile d’entrer un proche en EHPAD, et vous ressentez un mélange d’émotions contradictoires : soulagement, culpabilité, peur, tristesse… Ce choc invisible que vivent tant de familles est rarement évoqué ouvertement, pourtant il mérite toute votre attention. Comprendre ces ressentis et apprendre à les accueillir est essentiel pour accompagner au mieux ce nouveau chapitre.
Le choc émotionnel : un tsunami intérieur souvent silencieux
L’entrée en EHPAD n’est jamais un acte anodin. Derrière la formalité administrative, c’est un bouleversement profond qui s’opère, autant pour le futur résident que pour sa famille. Vous pouvez ressentir :
- Une culpabilité intense : « Ai-je fait le bon choix ? », « Est-ce que je l’abandonne ? »
- Un sentiment de perte : la maison, les habitudes, la familiarité qui disparaissent.
- Une inquiétude constante : sur la qualité de vie, la sécurité, la bienveillance des soignants.
Prenons l’exemple de Claire, qui a accompagné sa mère atteinte de troubles cognitifs. Elle me confiait : « J’avais l’impression de trahir ma mère, alors que je voulais juste son bien. Je n’osais en parler à personne. » Ce silence pèse lourd.
Sachez que ces émotions sont normales, même si elles semblent contradictoires. Ce choc invisible est un passage douloureux, mais aussi une étape de transition nécessaire.
La difficulté d’exprimer ses émotions : un isolement qui s’installe
Souvent, les proches minimisent leurs sentiments ou évitent d’en parler, par peur d’être jugés ou de blesser le résident. Ce silence peut entraîner un isolement psychologique et un mal-être profond.
Voici quelques raisons qui expliquent cette difficulté :
- La stigmatisation sociale autour de la dépendance et du placement en établissement.
- Le manque de temps pour se poser et exprimer ses émotions dans un quotidien déjà chargé.
- L’absence d’espaces dédiés pour les familles dans certains établissements.
Je recommande vivement de chercher des groupes de parole, des associations ou des professionnels spécialisés qui offrent un cadre bienveillant pour partager ces ressentis. Parler libère, apaise et permet de ne pas rester seul face à ce bouleversement.
Comprendre et accompagner le deuil d’une relation telle qu’elle était
Entrer en EHPAD, c’est aussi faire le deuil d’une relation d’autrefois, souvent marquée par la complicité ou le rôle de protecteur. Ce deuil, bien que non lié à la disparition physique, est tout aussi réel.
Quelques pistes pour mieux vivre ce deuil :
- Reconnaître que la relation évolue, elle ne disparaît pas.
- Accepter que certains rôles changent : vous n’êtes plus uniquement aidant à domicile, mais un soutien affectif précieux.
- Maintenir des rituels partagés, comme des visites régulières, des appels, ou des activités communes.
Par exemple, Paul, qui a placé son père en EHPAD, continue de lui lire des journaux chaque dimanche. Ce petit rituel a permis de préserver un lien fort malgré la distance physique.
L’importance d’un accompagnement humain et personnalisé pour les familles
Un bon accompagnement ne concerne pas seulement le résident : les familles doivent aussi être soutenues. Ce soutien peut prendre plusieurs formes :
- Des informations claires et régulières sur le quotidien en établissement.
- Un accompagnement psychologique pour gérer ses émotions.
- Des ateliers ou rencontres avec d’autres familles pour partager expériences et conseils.
Je constate que les établissements qui développent ces pratiques favorisent un climat de confiance et de sérénité. N’hésitez pas à demander cet accompagnement, il est votre droit et un véritable atout dans cette période.
Transformer le choc invisible en une nouvelle dynamique familiale
Peu à peu, ce choc initial peut devenir une opportunité de renforcer les liens, sous une autre forme. En intégrant l’EHPAD dans la vie familiale, vous créez de nouveaux repères et moments partagés.
Quelques conseils pour ça :
- Impliquer le résident dans les décisions du quotidien, pour préserver son autonomie.
- Organiser des visites régulières, avec des temps de qualité.
- Valoriser l’établissement comme un lieu de vie, pas seulement un lieu de soins.
Ainsi, la famille peut passer d’un sentiment de perte à une dynamique renouvelée, où chaque membre trouve sa place.
Le choc invisible de l’entrée en EHPAD est une réalité partagée par de nombreuses familles, souvent tue par peur ou par incompréhension. Accueillir ces émotions, en parler, se faire accompagner, c’est se donner les moyens de traverser cette étape avec plus de sérénité. Vous n’êtes pas seul dans ce cheminement : prenez le temps de vous écouter, de vous entourer, et de construire, avec votre proche et l’établissement, un nouveau quotidien apaisé et humain.
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